Le dernier cheval remonté en 1970

Le dernier cheval employé au fond, dans le secteur de Lens, est remonté en 1970. Jusqu’à cette date, il était utilisé pour le transport des cadres de décadrage, là où l’emploi des locotracteurs n’était pas possible. En 1971. Il est allé mourir de vieillesse dans une ferme à Tilloy-les-Hermaville. Ce cheval et ses « collègues » qui, à la fin des années soixante, l’avaient précédé dans la retraite, ne donnaient plus guère de soucis aux mineurs On les conservait pour de menus travaux et… par affection. Sujets de nostalgie, ils rappelaient l’époque où la bonne tenue des équipages du fond était une véritable nécessité. Tirées des archives du C.H.M., des circulaires produites par la direction de la Compagnie de Vicoigne et de Nœux, dans les années 1892 à 1 894, nous donnent un aperçu de ces problèmes aujourd’hui bien oubliés.

En 1892 cette Compagnie emploie au fond 172 chevaux répartis dans sept fosses. Parmi eux, cette année-là, 9 sont morts, 37 ont été réformés et vendus. Les causes les plus souvent évoquées de ces décès sont les coliques rouges, les blessures, les pleurésies ou tout simplement l’épuisement On se sépare également des chevaux qui présentent de mauvaises dispositions : le dénommé Belfort était « vicieux, mordait ruait » dit le rapport ; Métij « ruait au fond et ne tirait plus », Gabon « avait peur des lumières. » A une époque où les salaires moyens des mineurs s établissent à 1 400 F, le prix d’achat d’un cheval varie de 800 à 1 200 F. Les chevaux morts sont vendus à l’abattoir pour la somme de 20 F. Les autres, devenus vieux et poussifs, sont achetés par des fermiers parfois à des prix honorables.

La gestion des équipages est chose délicate ; les pertes enregistrées dans ce domaine sont importantes, trop importantes estime l’agent général de la Compagnie. Pour cette raison, M.S. Agniel s adresse à l’Ingénieur en Chef pour lui renouveler ses recommandations quant aux soins qu’il convient de prodiguer aux équipages. De nombreux chevaux sont réformés pour cause de crapauds aux pieds du fait qu’ils travaillent dans des voies humides sans recevoir les soins nécessaires Des instructions sont données pour que leurs pieds soient lavés soigneusement puis graissés complètement.

Chaque quinzaine, il faut transférer les chevaux des voies humides dans des voies en bon état et réciproquement. Les ingénieurs doivent mieux contrôler l’entretien des équipages, le sérieux et l’expérience des conducteurs. Une circulaire du 16 mars 1894 rappelle à l’ordre les ingénieurs qui négligent de faire un rapport à la suite des accidents de chevaux. Des amendes sont infligées : 2 F d’amende au conducteur de Notaire pour manque de soins et de précaution. Son cheval boîte, conséquence d’une chute due à un excès de fatigue ; 2 F d’amende au conducteur de Paravent, pour lui avoir fait traîner 17 berlines au lieu de 12 ; blâmes sévères aux palefreniers chefs, porions et chefs porions de ces services…

G.L